Le temps n’est rien. Les années passent. Les secondes s’égrènent. Sur une table, un sablier. De tes yeux, tu regardes le sable filer. Un côté, puis l’autre. C’est un objet que tu aimes bien observer. Non pas parce qu’il t’intrigue. Il te repose. Tes yeux se ferment au rythme de sable s’écoulant calmement. Tu t’envoles dans les bras de Morphée.

Petite fille, tu étais du genre à vouloir décrocher la lune pour savoir ce qu’il y avait dedans. Faisant les pires bêtises du monde. Donnant tout ce que tu avais à ceux que tu aimais. Tes cheveux blancs flottant au vent comme des vagues indisciplinées. Tu souriais à la vie. La vie te le rendait. Tu ne t’inquiétais pas. A quoi cela servait-il ? L’insouciance des enfants. Tu n’avais aucune notion du bien et du mal. Ton père, ta mère. Eux savaient te recadrer de temps en temps. Tu avais des professeurs, des amis. Tu aimais ton pays. Atlantide. Une cité émergée sous l’eau. Les poissons, tu les voyais de près. Les serviteurs de ton royaume apercevaient une fine silhouette sous le vent. Un morceau de robe rose. Des mèches de cheveux. Tu bougeais tellement vite à l’époque. Plus tard, tu es devenue une jeune adulte. Ta carrure s’est affinée. Tu as grandi. Tu ne te reconnaissais plus. Et puis… ta mère n’était plus là. Tu n’as pas su réellement ce qui s’est passé. Des flashs seulement. Une grande lumière bleue. Les gens couraient partout. Et toi, toute petite. Tu criais. Tu tenais la main de ta mère fermement. C’était ta bouée de sauvetage. Ton refuge. Lorsque tu faisais des cauchemars, c’était les cheveux, l’odeur de ta mère qui t’apaisait. De sa voix, elle te chantait des berceuses. Ta mère c’était le soleil après la pluie. Ta mère c’était le pansement magique qui soignait tes blessures les plus profondes. Ton père faisait figure d’autorité. Tu le craignais. Tu le respectais. Tu l’aimais. Alors, lorsque ta mère disparu, un vide naquit en toi. La lumière bleue l’avait emporté loin de toi. Toutes les larmes ne suffisaient pas pour montrer ton chagrin. Ta souffrance. Rien ne comptait plus à tes yeux. Tu refusais toutes formes de nourriture. Ton père n’avait plus aucun intérêt. Ta chambre était ton refuge dans cette obscurité. Prostrée devant le miroir tu attendais un miracle. Le miracle ne vint pas. Ta mère ne vint pas. Elle était partie. Et ça, tu ne voulais tout simplement pas le comprendre.

Le temps passe tandis que toi, jeune fille, tu as mûris. Petite fille devenue grande. Tu as appris à gérer le royaume d’une main de fer avec ton père. Toujours juste, tu réglais les problèmes lorsqu’il y en avait. Tu aimais ton peuple comme une mère prenant soin de ses enfants. Atlantide était ton pays, ta mère nourricière. Tu te devais de prendre comme ton père qui t’enseignait les rudiments de reine. Justice, équité. Dans ses yeux blancs, tu voyais bien la tristesse profonde qu’il avait aussi éprouvé en perdant ta mère. Femme vivement regrettée. Tu t’efforçais de jamais y penser. Néanmoins, la nuit est source d’angoisse et de peur. De souvenirs effacés qui reviennent peu à peu. Ta mère te serrant dans ses bras. Des discussions passionnées d’une fillette à une mère. Des rêves d’enfants. Tu fuyais de ta chambre lorsque les souvenirs se faisaient de plus en plus puissants. Tu aimais cette solitude tandis que tu vagabondais dans les rues inanimées de ton pays. Tu ne connaissais rien d’autre. Tu n’imaginais même pas qu’il pouvait y avoir des gens autre. Des gens de l’extérieur. Comment le pouvais-tu d’ailleurs ? Ton père ne t’avais rien dit.

C’était un jour de beau temps. Tu as appris les choses dont tu devais savoir. Ton père ne te disait rien sur son état de santé… Tu n’étais pas dupe pour autant. Il se faisait faible. Ses mains tremblaient. Ses yeux se fermaient à toutes heures de la journée. Il avait du mal à respirer. Même avec le collier que tous les atlantes portaient. Le collier en cristal qui permettait de rester en vie, de soigner les maladies. Tu ne comprenais pas. Les larmes refusaient d’être versées. Pourtant que ferais-tu sans lui ?

Le soleil brillait de mille feux lorsque tu les as vus pour la première fois. Ils étaient comme toi en apparence. Mais ils n’appartenaient pas à ta cité. Ils venaient de loin. De très loin. Un groupe de personne. Des hommes. Beaucoup. Des femmes. Trois s’élevaient cependant. Un homme fort, plein de muscle. Une femme. Cheveux blond. Elle te faisait peur. Et un jeune homme. Tu les avais observés pendant de longues heures, oubliant presque ton peuple. Que faisaient-ils ces gens ? Qui étaient-ils ? Tu vins à eux lorsqu’ils s’y attendirent le moins. Portant un masque, tu ne révélais pas tout de suite ton visage. Ils te parlèrent pour te donner confiance. Ils étaient venus ici pour découvrir. Tu les crus. Comment pouvaient-ils mentir de toute façon ? Il n’y avait rien de particulier à Atlantide. Tu avais tort. Cela se passa très vite. Ton père mourut alors qu’il essayait de dissuader l’homme de ne pas toucher à l’énergie de ton pays. Milo était là, tout le temps auprès de toi. Il était là lorsque la grande lumière blanche te prit dans ses filets. Tu n’étais plus Kidah. Tu n’étais plus humaine. Tu étais nulle part et partout à la fois. Le groupe t’emmena. Tu voyais tout cela de loin. Tu étais indignée. Te débattant pour rien. Ton corps ne t’écoutait plus. Et l’aide vint. Milo sur la machine. Et des amis, des gardes. Tous là pour te sauver. Dans cette pièce sombre, tu ne voyais rien. Mais tu sentais. On t’a libéré de ces chaines. Et tu as flotté. Flotté tout en haut. L’énergie a appelé les titans de pierre pour sauver Atlantide. Etait-ce ton amour pour ton pays ? Ton amour pour Milo ? Tu les as tous sauvé d’une mort certaine. Les méchants étaient punis comme dans les histoires de contes de fées. Le groupe parti… sauf Milo.


La neige tombe dans ta boule de cristal. Tu aimes ces petites figurines enfermées. Tu aimes la retourner et attendre que la neige se pose doucement sur le sol. Comme toi à présent. Tu n’es plus rien dans cette énorme ville. Plus qu’une personne dans la masse. Cela ne te dérange pas outre mesure. Ton pays, ton monde te manque. Atlantide a disparu. Tu as disparu pour apparaitre dans un monde obscur dont les coutumes te sont inconnues. Tu ne comprends rien de ce qui se passe. Tu te souviens d’un flash. D’une lumière blanche cette fois. Et un évanouissement… et une rue. Une rue étrange. Tu t’es cognée entre les murs. Où étais-tu ? Tu n’en savais rien. Tu as retrouvé Milo. Milo, ton âme sœur. Lui aussi n’a pas compris. Bientôt vous vous êtes trouvé un appartement dans une rue calme, tranquille. Les gens… il y en avait plein… Une foule compacte. Tu as pris peur. Pendant plusieurs jours tu n’es pas sortie de chez toi. Puis la curiosité t’as fait sortir. Tu abordes les gens dans la rue. Tu leur poses tous plein de questions. Tu vois dans leurs yeux de la confusion comme s’ils ne savaient pas de quoi tu voulais parler. Tu as l’habitude à présent. Tu as 19 ans dans ce monde peuplé d’êtres humains. Tu devrais aller au lycée, passer ton bac. Au lieu de cela, tu as décidé d’explorer les environs. Les océans. L’eau… c’est ce qui te rapproches le plus d’Atlantide. Tu rêves de le retrouver. Tu rêves de te marier, d’unir ta vie à celle de Milo dans la petite clairière de ton défunt pays. Tu sais qu’un jour tu le retrouveras. Plusieurs scientifiques t’ont découverte, t’ont proposé un boulot. Tu l’aimes ton job. Plonger, nager, observer. Les jours où tu n’as pas accès à l’océan tu te plonges dans ta baignoire. C’est mieux que rien. Tu veux retrouver ton peuple, ton pays. Dans ton lit, dos à Milon quelques fois tu pleures. Tu feras en sorte de retrouver Atlantide.