PART ONE

Citation :

« Belle. C'est un mot qu'on dirait inventé pour elle. Quand elle danse et qu'elle met son corps à jour, tel un oiseau qui étend ses ailes pour s'envoler alors je sens l'enfer s'ouvrir sous mes pieds. J'ai posé mes yeux sous sa robe de gitane, à quoi me sert encore de prier Notre-Dame ? Quel est celui qui lui jettera la première pierre, celui-là ne mérite pas d'être sur terre ! O Lucifer ! Oh ! Laisse-moi rien qu'une fois, glisser mes doigts dans les cheveux d'Esméralda. »

Esméralda la bohémienne. Sans père, qui abandonne sa mère qui elle meurt à l'accouchement. Sans parent. Avec Clopin. Le sauveur. Le roi. Le chef de la cour des miracles. Clopin son sauveur, Clopin son père. Alors elle a grandit, douce déesse libre, volant au vent, hurlant à la lune, touchant le feu de la vie du bout des doigts, le feu de la mort aussi. Jamais douce, jamais calme. Hurlant, sautant, riant. Tel a toujours été Esméralda aux yeux de tous. Danseuse, charmeuse. Brillante de sa souplesse. Voleuse. Faisant les poches des gens pendant que d'autres faisait leur numéro. Douée, car sachant se rendre adorable, discrète quand il le fallait. Elle ne volait que quelques pièces. De quoi manger. Douce enfant sans innocence. Espiègle, pourtant elle a toujours su qu'elle devrait se battre pour survivre. Avec l'espoir fou que cela change néanmoins.
Et alors qu'on se donne si facilement, pour un râle, pour un soupir, pour la jouissance, Esméralda parcours les années en se préservant. Elle danse pour faire soupirer. Elle danse pour émouvoir. Si belle, elle ensorcelle. C'est d'ailleurs ce qu'il se passe le jour de la fête des fous. Alors qu'elle danse dans sa robe rouge, sautant sur les genoux du haut juge. Riant aux éclats de tout ça. Et puis, vient Quasimodo. Laid aux yeux des autres, si beau à ses yeux. Elle qui ne supporte l'injustice. Qui crèverait pour l'égalité.
Elle sauve celui que tout le monde considère comme un monstre, défiant l'autorité du grand juge, ne l'énervant que plus alors qu'elle le tourmentait déjà. Sauvetage qu'il lui rendra bien.

Citation :

« Belle. Est-ce le diable qui s'est incarné en elle pour détourner mes yeux du Dieu éternel ? Qui a mis dans mon être ce désir charnel pour m'empêcher de regarder vers le Ciel ? Elle porte en elle le péché originel : la désirer fait-il de moi un criminel ? Celle qu'on prenait pour une fille de joie une fille de rien, semble soudain porter la croix du genre humain. O Notre-Dame ! Oh ! Laisse-moi rien qu'une fois pousser la porte du jardin d'Esméralda. »

Esméralda bouleverse tout sur son passage. Sorcière siffle-t-on parfois quand elle passe près de quelqu'un, en dansant. Elle se joue du monde, joue des tours, en apprend d’autre à Djali. Adorable chèvre intelligente. Mais à force de se jouer des autres. On se met en danger. Oh l’arnaqueuse, la menteuse. Les hommes s’éprennent d’un cœur libre. Esméralda n’aime pas. Elle effleure de baisers sucrés, elle donne une infime partie d’elle. Esméralda le feu. Esméralda l’iceberg. Pas farouche la demoiselle, mais pourtant pas prête à en donner trop au premier venu. Elle frustre la gitane. Elle rend fou. Au point de mettre une ville à feu et à sang pour elle. Protégé coûte que coûte par ces pairs d’un fou. Fou d’elle. Fou de Dieu. Frollo perdu. Frollo qu’elle tourmente en roulant des hanches. Elle s'enroule, comme un serpent. Créature du diable. Vil tentatrice. Elle sème le doute dans le cœur des hommes. Elle n'appartient à aucun, tous la veule, une minute, une heure, une nuit, une vie. Dans leur rêve elle revient la douce bohémienne, chanter des mots clairs, des mots purs. Le rêve devient cauchemar alors qu'elle se refuse. Virginité précieuse. A ne pas donner à n'importe qui. Seulement l'être aimé. Et il n'est pas là.
Alors Esmeralda, elle fuit. Elle approche les hommes, danse pour eux, leur donne un instant de rêve avant de fuir. Sorcière tentatrice. Gitane. Voleuse de cœur. Arnaqueuse du désir. Tricheuse. On pourrait tout reprocher à la bohémienne. Elle n'en est rien. Âme pur, détesté pour ça. Incompréhensible Frollo. Chaste homme qu'elle aura rendu fou de sa beauté, des émeraudes de ses yeux. Plaindra-t-on seulement le Haut Juge de son acharnement ou le punira-t-on d'avoir rendu Paris si misérable pour l'amour d'une femme ? Rébellion, Notre-Dame en feu et Quasimodo qui la sauve à son tour. La faiblesse de l'homme à ses pieds. Frollo brûle en tombant de Notre-Dame. Paris est libre. Pour si peu de temps.

Citation :

« Belle. Malgré ses grands yeux noirs qui vous ensorcellent, la demoiselle serait-elle encore pucelle ? Quand ses mouvements me font voir monts et merveilles, sous son jupon aux couleurs de l'arc-en-ciel. Ma dulcinée laissez-moi vous être infidèle, avant de vous avoir mené jusqu'à l'autel. Quel "st l'homme qui détournerait son regard d'elle ? Sous peine d'être changé en statue de sel. O Fleur-de-Lys, je ne suis pas homme de foi. J'irai cueillir la fleur d'amour d'Esméralda. »

Et entre temps, mêlé à Quasimodo et Frollo, il y a Phoebus. Blond, grand, courageux. Si près, si loin. Qui serait mort pour elle et a qui pourtant, elle n'a pas donné non plus sa vertu. Ô Phoebus, elle l'aime. Chastement. Avec candeur. Mais elle la séduit comme les autres. Charme de la bohémienne. Sauvage et différente.  Il la sauve lui aussi. Elle le sauve à son tour en le sortant d’eau trouble. Quasimodo comprend qu’Esméralda, celui qu’elle aime, c’est Phoebus, le beau et courageux Phoebus. Il accepte cette décision. Et pourtant jamais Esméralda ne s’offre à cet homme. Perdue, pensive. Un homme est mort en la traquant. Remord ? L’homme de Dieu cruel mort dans les flammes. Oh Esméralda aime être séductrice, mais elle n'a jamais voulu rendre un homme fou. Frollo l'était déjà, elle n'a fait qu’aggraver les choses.


PART TWO

Réveil en sueur. Personnage animé. Feu. Sang. Lien. Homme difforme. Quasimodo. Phoebus. Clopin. Frollo. La tête en vrac, l’âme absorbé, le cœur qui se déchire. Qui est-elle ? Qui est cette bohémienne qui hante ses souvenirs, elle, humaine. Elle sait. Mais ne se l’avouera jamais. Se pense un instant folle et l’autre refoule ses souvenirs d’une vie antérieurs. Refoulé. Mais la gitane ne se laisse pas abattre. Vivre une vie normale, voilà ce à quoi elle aspire désormais. Mais alors que Frollo est ici lui aussi, comment pourrait-elle ? Et puis, il y a Phoebus, il y a Clopin et Quasimodo. Comment avoir une vie normale avec ses anciens compagnons personnages ? Comment être une autre quand tout ceux qui vous rappelle qui vous êtes vraiment sont avec vous ?
Lutter contre le passé. Nager à contre-courant. Esméralda lutte de toutes ses forces. Mais s'adonne parfois à ses vieux démons de séductrice. Elle tente, vil créature maléfique, serpent, s'enroule, donne un peu de chaleur. Pour fuir plus vite. Elle ne peut se résoudre à appartenir à un seul homme quand elle peut avoir le regard de tous. Appartenir à n'importe qui n'est pourtant pas pour elle. Alors, elle continue, elle danse, oublie, retrouve la peau d'Esméralda le temps d'une minute. Frollo, Clopin et Quasimodo sont là. Mais où est Phoebus ? Qui la sauvera encore du Haut Juge ? On dira d'elle, pauvre Esméralda. Perdue, brisée, bloquée entre passé et présent. Il n'en est rien. Esméralda se battra, quoi qu'il arrive. Tumultueuse brune. Bohémienne. Gitane. On se brise sur le récif de sa beauté.