Lorsqu’on a passé la journée à régler les différentes histoires de la ville entre les groupes, qu’on a renfloué les stocks de ses larbins pour qu’ils retournent en ville faire marcher le trafic, on avait bien le droit de se détendre un peu, quoi que, là encore, il s’agissait de travail. Lorsque Roscoe avait reçu son billet pour l’opéra de Fantasia Hill, il avait tout de suite su à quoi il allait lui servir ; de point de rendez vous avec un autre gros bonnet du milieu. Personne ne s’attendrait à les voir là, c’était parfait. Car il faut l’avouer, voir le jeune homme tatoué de la tête aux pieds dans un tel lieu était plutôt étonnant. Une heure avant le début du spectacle, il était encore dans un bar, vêtu d’un blouson de cuir noir et d’un débardeur blanc, ainsi que d’un jean clair. Il ne s’était décidé à aller se changer qu’au bout d’une demi-heure.
On pu donc apercevoir le jeune Travis ressortir de chez lui, habillé d’un costard noir, avec la cravate de la même couleur, et une chemise blanche. Très simple, certes, mais sur quelqu’un tel que lui, à la carrure de mannequin et au style particulier, cela ressortait très chic. Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir été un beau et grand doberman qui avait influencé ses gouts, mais il ne jurait souvent que par le noir, d’ailleurs, la moto qu’il emprunta afin de se rendre à l’opéra était également de cette couleur.

Ce n’était pas une Harley, c’est donc sans vraiment de vacarme que la moto se gara sur le bord du trottoir. Retirant son casque, Roscoe constata qu’il y avait foule, le spectacle avait attiré beaucoup de monde. Un sourire en coin, amusé, apparu sur son visage à la vue d’un jeune homme qui volait un billet avec discrétion dans le sac d’une jeune demoiselle. En même temps, tout le monde était bien habillé, et une lady avec un gros sac ferait tâche dans le décor ; elles avaient donc toute des pochettes ou des sacs à fine courroies. Habitué, il ne fallut que quelques secondes à Travis pour explorer toute les possibilités de vols qu’il pourrait commettre ; mais il n’avait plus besoin de ça, il avait tant d’hommes sous sa main qu’un seul claquement de doigts rendraient toutes ses personnes fauchés.
Une femme attira son attention ; elle n’était plus de toute fraicheur, mais on ne pouvait pas la louper avec ses cheveux noirs & blanc, et sa classe qu’on ne pouvait remettre en question. Qui n’aurait pu reconnaitre Mme De Vil ? Il ne lui avait jamais parlé, mais son nom était connu. Elle s’engouffra dans la salle alors que lui n’était encore que devant la porte vitrée qui permettait de rentrer dans le bâtiment. Une cigarette, avant toute chose. D’un geste mécanique, il en sorti une et la fuma, surveillant les alentours d’un air calme. Il faisait bon, et la journée avait été plus ou moins tranquille, que cela continue.

Une fois rentré, Roscoe continua de jouer machinalement avec son briquet, tout en passant au milieu des gens, sans faire attention à eux ; il en poussa même quelques un de l’épaule. Il pouvait avoir l’air supérieur, mais ne l’était pas ; c’était sa confiance inébranlable en lui-même qui donnait cet effet. Il forçait le respect de par sa grande taille et sa carrure ; déjà en chien, il avait toujours eut la tête et les oreilles bien droite, un vrai chien de garde, et encore aujourd’hui, on jurerait qu’il était capable de sortir les crocs.
Un enfant tenait la main de sa mère et regardait le jeune homme aux yeux d’un bleu captivant en faisant des grimaces, notamment en louchant. Roscoe ne pu s’empêcher de lui tirer la langue, sans pour autant avoir un comportement enfantin. Rentrant enfin dans la salle, il réfléchit quelques secondes ; il était invité à rejoindre les loges, mais était-ce le mieux ? Assurément, oui, personne ne le verrait récupérer l’argent que lui devait son client. A peine installé, l’annonce que le spectacle allait commencer se déclencha.
« Mesdames et Messieurs nous vous informons que le ballet commencera dans quelques minutes à présent. Veuillez prendre place et bon spectacle à tous.»
Enfin ! Espérons qu’il ne mettrait pas longtemps à pointer le bout de son nez et que le ballet ne soit pas ennuyant et rébarbatif.

Crédit de la fiche: STILLNOTGINGER

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