« Adeline, lève-toi, le petit déjeuner est prêt ! » M’annonça fièrement ma mère en ouvrant les rideaux de ma chambre. Je râlai pour la forme mais sa bonne humeur, quoiqu’un peu forcée, me dérida bien vite. Surtout lorsqu’elle se jeta sur mon lit et m’assailli de chatouilles. Une vraie torture moi qui les craignait tant. Mon rire se propagea rapidement dans la chambre si bien que l’on oublia vite que ces derniers étaient éphémères. Mais cette misérable vie reprit vite son cours et, bientôt, je fus prise d’une quinte de toux impossible à arrêter. L’air qui passait dans ma gorge semblait me brûler tout l’intérieur et mes poumons se trouvaient en feu. Ma génitrice se releva en me caressant les cheveux puis me blottit contre sa poitrine. « Là, calme-toi, ça va passer. Respire doucement. » Sa douce voix me rassura et je pris ses conseils à la lettre. Quelques mois plus tôt, on m’avait détecté une grave maladie qui ne pouvait se guérir qu’à condition d’avoir une greffe. La mucoviscidose. Ce nom ne vous dit peut-être rien, elle est si peu médiatisée et pourtant … Le don d’organe pourrait sauver tellement de vie si l’on se donnait la peine d’en faire connaître les mérites. Un soupir arrêta ma quinte de toux et mes pensées néfastes. A dix-neuf ans, j’étais déjà condamnée …

« Maman, j’aimerais prendre mon indépendance. » Il était exactement 14h31 de l’après-midi. L’horloge du salon égrenait lentement les secondes par un tic-tac qui me rendait bien souvent folle. Je vis les yeux de ma mère se couvrirent de chagrin. Je me mordis la lèvre, bien consciente que ma réclamation était bien trop dure à avaler pour elle. « Adeline, tu as encore toute la vie devant toi pour partir de la maison. » Je pris une grande goulée d’air frais – enfin ce que je pouvais tout du moins – puis posais doucement ma main sur la sienne en caressant sa peau de mon pouce. « Maman, j’ai un travail désormais et il est temps que je m’assume. Je ne vais pas rester ici éternellement. Tu en as déjà bien assez fait pendant ces trois ans où tu as du nous faire vivre. Je suis sous traitement, je respirai un peu mieux et je suis sur liste d’attente. J’ai aussi des amis formidables prêts à me venir en aide. Sache aussi que ma porte te sera toujours ouverte. » J’agrémentai mes paroles d’un petit sourire avant de me lever et de la prendre dans mes bras. Mes lèvres se posèrent sur ses cheveux si soyeux.  « Je t’aime. » Je sentis un sanglot venir secouer ses épaules mais je savais déjà qu’elle n’allait pas se mettre en travers de mon chemin pour que je puisse quitter la maison. « Ton père serait fier de toi. » Et là, ce fut à mon tour de laisser une larme courir sur ma joue.

« Raaaah c’est nul ! » Oui, je n’arrivais plus à écrire quoi que ce soit. Pryam ne cessait de se loger dans mes pensées. Ses sourires, son regard … Je l’aime bon sang ! Mais c’est trop tard, trop tard pour tout cela. Il devait vivre heureux, avec une autre. La mucoviscidose ne laisse pas beaucoup de marge quant à notre survie dans le temps. Certes, la médecine nous dis que l’on peut vivre jusqu’à 47 ans en moyenne mais combien arrivent à ce stade ? Je rayais bien vite les mots écris sur le papier et lâchais ma guitare, déjà fatiguée d’avoir un peu trop poussé sur ma voix. Je me suis dirigée vers la fenêtre histoire de caper un minimum les rayons du soleil. Dans quelques minutes, je partirai vers un centre équestre quelconque afin d’aller encourager Jersey lors d’un de ses concours. Pryam sera de la partie. Ô dure réalité …

C’est avec un soupir que je refermai les pages de mon journal. C’était si étrange de relire mes pensées et mes sentiments. Je le rangeai dans mon sac tandis que mes deux fidèles amis poussaient la porte du Starbuck dans lequel je les attendais. Un autre jour, une autre histoire …