Je devais le faire. C’était mon devoir et ma responsabilité. D’ailleurs, n’était-ce pas celui de toutes les mères de la terre ? Veiller à ce que son petit se porte bien et ne court aucun danger ? À mon avis, ça devrait être le cas. C’est un réflexe, tout simplement. Lorsque j’ai entendue le bruit des chasseurs, j’ai suppliée Bambi de s’enfuir. Je lui ai hurlée de courir le plus vite possible afin qu’il ne soit pas blessé ou pire. J’ai tentée de le suivre du mieux que j’ai pue. J’ai détalée le plus rapidement possible, mais hélas, je ne suis pas parvenue à être suffisamment rapide. La balle a atteint mon flanc sans même que je n’aie le temps de faire quoi que ce soit pour l’en empêchée, et je suis tombée. Le chasseur avait atteint sa cible. Il m’avait eu. Lorsque mon âme s’envola, je ressentie énormément de chagrin. J’avais failli à ma tâche. Je ne pourrais pas aider mon fils à atteindre l’âge adulte. Je ne pourrais plus le voir grandir sous mes yeux. Je fus envahie par le profond sentiment de l’avoir abandonné. J’ai même crue qu’il m’en voudrait de l’avoir laissée seul, de ne pas être parvenu à le suivre. J’ai aussi eu peur de ce qu’il allait devenir. Après tout, il était encore si jeune. Il en avait encore tellement à apprendre sur le monde cruel dans lequel nous vivions. Heureusement, son père vint le prendre en charge. À partir de ce moment, je sue que je pourrais reposer en paix. La relation entre mon époux et moi n’avait jamais été des plus traditionnelles. Nous nous aimions, pour moi c’était indéniable, mais en même temps, j’avais toujours qu’il avait des responsabilités ailleurs. Des responsabilités qui le poussaient à aller voir d’autres biches avec lesquelles il avait eu des enfants aussi. C’était comme ça et je m’étais toujours fait à cette vie. Cependant, j’étais heureuse et soulagée qu’il prenne Bambi sous son aile, qu’il le traite enfin comme on traite son enfant. Aussi, je pris un malin plaisir à observer Bambi du haut des cieux, à le voir évoluer sous les enseignements que son père lui prodiguait. Come d’habitude, il était très écarté, ce qui ne me surprenait guère. Je ne saurais me rappeler le nombre de fois où je l’avais grondé parce qu’il avait été irresponsable pour une manière ou une autre. Mais en même temps, je ne pouvais m’empêcher d’être fière de lui. Peu à peu, il devenait un cerf grand et fort. Un cerf qui saurait devenir un Grand Prince lui aussi, tout comme son père l’était. Je le vis aussi tomber peu à peu sous le charme de la jeune Féline qu’il avait connu alors qu’il n’était encore qu’un enfant. Tout ceci me réjouissait vraiment le cœur et me prouvait que mon sacrifice n’avait pas été fait en vain. Seulement voilà, la saison de la chasse revint très rapidement et par la même occasion le danger aussi. De là où j’étais, je ne pouvais m’empêcher de m’inquiéter. Pou Bambi, pour mon époux, pour Féline, pour tous mes vieux amis de la forêt. J’espérais de tout cœur qu’il ne leur arrive rien. Puis, alors que je m’efforçais de me concentrer sur la scène qui se déroulait sous mes yeux, je sentis un tourbillon m’entraîner et me tirer vers le bas. Je tentai tant bien que mal de m’en échapper, jugeant que j’étais très bien là où j’étais, mais cette force était trop grande et elle m’entraîna avec elle. Puis, ce fût le trou noir.




Lorsque j’ouvris les yeux, j’étais allongée sur l’herbe dans un parc. Allongée ? Disons que ce n’était pas vraiment son signe. Une biche ne s’allonge jamais sur le dos, non ? Aussi, je tentai d’étirer mes pattes afin de me remettre debout. Ce n’est qu’à cette instant que j’eu la surprise qui me glaça d’effroi. Au lieu de mes sabots habituels se trouvaient des mains. Oui oui, des mains comme celles des humains. Comme celles des chasseurs qui m’avaient tiré dessus. Et si ce fait n’était pas suffisant pour me rendre complètement dingue, il y avait aussi l’idée que je sois revenue sur terre. Comment était-ce possible ? J’étais morte. Il n’y avait aucune chance pour que je revienne à la vie. Me relevant maladroitement du sol, je me mis à courir du plus vite que je pouvais sur deux pattes, fonçant sans même regarder où j’allais. D’ailleurs, je passai à deux doigts de me faire heurter de plein fouet par une immense machine au bruit assourdissant – une voiture d’après ce qu’on m’a apprit maintenant. L’humaine qui avait failli me frapper sortie en trombe de son appareil afin de vérifier si j’allais bien. Dès qu’elle posa la main sur moi, je me mis à me débattre de toutes mes forces. Je ne voulais pas qu’elle me touche. Je ne voulais qu’aucune créature de ce type ne me touche. Ils étaient tous des monstres, sans exception. La preuve, en voyant ma réaction, elle téléphona aux autorités de la ville afin qu’ils m’arrêtent. À son avis, il n’était pas normal de voir une femme courir à poil en plein centre ville. Nah mais il fallait tout de même me donner une chance, non ? J’ignorais qu’il fallait porter des vêtements à cette époque. Toujours est-il qu’ils m’emmenèrent à l’hôpital, jugeant que mon cas était assez grave. Non seulement mes propos étaient incohérents, j’étais nue et je ne cessais de dire que j’étais morte. Aussi, ils ne tardèrent pas à considérer que j’étais folle et qu’il me fallait un traitement adéquat. Pendant un an, ils m’ont gardé sous observation dans leur institut, me faisant voir une multitude de psychologues afin de régler mes problèmes. Si au début je refusais de coopérer, je finis par me plier à leurs exigences. Non seulement j’avais envie de sortir de là, mais en plus je me rendais bien compte qu’ils étaient là pour m’aider et pas pour me nuire. Aussi, je me mis à leur parler. De mon fils, de mon mari, de mes amis, sans oublier de ne pas parler de mon ancienne vie de biche. Autrement, j’y serais sans doute encore… Au bout d’un moment, ils finirent par me laisser sortir de là, jugeant que j’étais à présent apte à retourner en société. Ça me fait mal de l’admettre, mais ce passage en psychiatrie n’a sans doute pas été un mal pour moi. Au moins il m’aura permis d’accepter ma condition qui est désormais d’être une humaine.

Avec le temps, j’ai appris à me bâtir une vie bien à moi. Je me suis trouvée un travail comme professeure de langues pour des adolescents et j’ai un toit sur la tête grâce au Méli-Mélo House qui accueille des gens qui, comme moi, sont sortis tout droit d’un tout autre monde. Je ne peux pas dire que je me suis totalement fait à l’idée de vivre cette nouvelle existence désormais, mais je m’efforce à tous les jours de voir els choses du bon côté. La vie m’offre une nouvelle chance. Une chance de vivre et de profiter de chaque opportunité. Je ne peux tout bonnement pas dire non à ça. Aussi, j’essaie d’être souriante et aimable et de ne plus craindre les dangers que je pourrais courir. Seulement voilà, une question ne cesse de me tourner sans cesse dans la tête : si moi je suis ici, est-ce que mes anciens proches le sont aussi ? Après tout, rien ne me ferait plus plaisir de revoir Bambi, Féline, mon époux et mes vieux amis. Il faut absolument que je les retrouve et le plus tôt sera le mieux.