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Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Vide
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 Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt

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MessageSujet: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyDim 20 Oct - 0:39

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Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

« Je crains que nous ne nous soyions mal compris. L'argent ne m'intéresse pas. » L'homme eut un petit sursaut, et regarda Drystan sans comprendre. « Comprenez que si l'on me payait avec de l'argent, je serais d'une part immensément riche, or je le suis déjà, et je risquerais ma vie pour des raisons évidentes. Ce dont personne n'a envie, n'est-ce pas ? Soit. » Il fit une pause. « Si je tue la personne de votre choix, vous me devrez un service par la suite, que je peux demander au moment où je le veux. Est-ce bien clair ? » L'homme hocha la tête, et tendit un dossier, qu'il posa sur le bureau ; puis, hochant la tête, il se leva, avant de se diriger vers la porte. « Elle sera tuée d'ici deux jours, sans faute, sans bavures, et elle ne souffrira pas. » Il l'ouvrit, fit un pas. « Juste une précision. » L'homme se retourna. « Pourquoi vouloir la tuer ? » Il n'avait pas pour habitude de se montrer curieux, mais parfois, la curiosité n'était qu'un parcours logique. Certains pensent que nous vivons dans un monde où tout est possible ; où deux évènements, qui en apparence n'ont en commun que le nom d'évènement, peuvent avoir en réalité une logique qui n'apparaît qu'après étude, analyse ; seuls certains la dessinent dans l'esprit. Le monde est façonné de telle façon : chaque chose a une logique. Chaque évènement, de même, et reliés entre eux, ils forment des équations, des suites de chiffres, de nombres, incompréhensibles pour la plupart. Le hasard n'est qu'une création de l'homme, et pourtant c'est bien le hasard qui poussa Voltaire à poser cette question. L'homme réfléchit quelques instants, haussa les épaules. « Considérez que Dieu la condamne enfin pour ses péchés. »
Il alluma la lumière, et ouvrit le dossier. Des mots s'affichaient, les uns après les autres, incompréhensibles pour quiconque était incapable de les détecter et de les traduire. Il lut, dévora le dossier pour en savoir le plus possible sur la victime qu'il devait tuer. Il se surprit à penser que cette jeune femme ressemblait beaucoup à son Essylt, mais s'ôta cette idée de la tête ; il était impossible que quelqu'un veuille tuer son Essylt. Elle était si douce, si délicate que la « condamner pour ses péchés » aurait été blasphème ; pire que cela, il eut été impossible qu'on lui en veuille.
Décidé, et une fois le dossier à l'abri dans son esprit, il se dirigea d'un pas vers la cheminée, et mit le dossier au feu, afin d'éviter la découverte de secrets qu'il n'aurait pas voulue. Puis, prenant son manteau et son arme, un silencieux de petit calibre, qu'il cacha dans son manteau, il sortit et prit la grande avenue.
Il eut tôt fait de la trouver, ce n'était pas bien compliqué. Il s'était simplement approché de la paroisse dans laquelle elle se trouvait, souvent, et l'avait suivie, silencieusement, attendant le bon moment, celui où elle ferait l'erreur de tourner dans une ruelle vide, obscure. Une ruelle qui causerait sa perte.
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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyLun 28 Oct - 1:17

« Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir » ♔ Charles Baudelaire
Le craquement des feuilles ambrées sous ses pas l’intimidait presque. Elle jeta autour d’elle un regard à la dérobée. Elle craignait qu’on l’épie. La ruelle était dépeuplée. Elle resserra ses bras autour d’elle, marchant tête baissée, frôlant le mur de briques poussiéreuses. Sans qu’elle ne sache pourquoi, elle pensa à Jasmine. L’attitude de cette femme la laissait perplexe, elle ignorait encore s’il valait mieux se méfier d’elle ou prendre ses conseils pour une marque d’amitié. Quoiqu’il en soit, Jasmine n’était pas une femme qui marcherait en observant fermement le bout de ses bottines à talons, ni qui se stopperait net, figée d’effroi, au moindre crissement de roue sur le bitume humide. Mily avait jadis été plus téméraire, elle battait la campagne avec sa sœur, tresses au vent, aidait son frère à couper du bois, retroussait ses jupes pour y transporter des œufs, elle n’avait pas peur de la moindre rafale, elle n’avait pas peur de tomber malade, de tomber raide morte, de tomber en lambeaux fanés. Désormais, la conscience de son trépas en cours s’était insinué puis bien ancré en elle. C’était une de ces journées automnales aux belles couleurs brunies mais à la chaleur absente, un de ces soirs où la nuit s’abattait sur les passants comme une nuée de corbeaux, subitement. Ayant fait le tour de l’église, elle s’arrêta devant une porte en ogive et expira son essoufflement d’avoir marché trop vite. L’air qu’elle souffla se cristallisa dans le froid ambiant en petites volutes incertaines, avant de frissonner sous l’ombre du vent. En glissant une main dans la poche de son manteau de velours blanc, elle sentit sous ses doigts un morceau de papier émietté. Elle se rappela alors Peter Shadow. Encore un problème, un échec, qu’elle avait tristement enfoui en elle après qu’il ait tout déchiré de rage. Cependant, un bruit de pas, très indistinct, la tira de sa rêverie et la fit sortir de sous l’arc-boutant où elle était lovée. Elle regarda en arrière, les pupilles dilatées pour scruter la pénombre. Personne. Elle entrouvrit les lèvres. Articuler un son lui fut impossible, ses nerfs étaient trop à vif. Aussi ce « est-ce qu’il y a quelqu’un ? » demeura-t-il en elle. Elle fit volte-face avec empressement mais de manière rigide, gardant un semblant de contenance inutile pour des spectres invisibles qui l’aveuglaient d’angoisse. Elle fit un pas, puis deux, puis trois-quatre-cinq. Elle manqua de trébucher sur un pavé lorsqu’elle entendit derrière elle d’autres pas que les siens. Elle devint livide, tout le sang que contenait son corps afflua à ses jambes qui tremblaient sous le tissus de sa jupe. Sauve-toi. Dans le même temps, la brume s’emparait d’elle, l’engourdissait, lui ôtant tout espoir de fuite. Les pas dans son dos se rapprochèrent. L’inconnu sans visage se mit à courir à sa suite. Elle était statique et paniquée. A une vingtaine de pas, un lampadaire l’appelait de son halo rassurant. Elle fixait l’éclat de sa lumière liquéfiée sur le pavé pluvieux, mais elle savait qu’elle ne l’atteindrait jamais. Les pas se stoppèrent juste derrière elle, son cœur régurgitait ses propres battements, une main se posa sur son épaule, elle crut qu’elle allait tomber, étouffée par son cri sous ses lèvres scellées.
« Mademoiselle… »
Oh, comme elle aurait voulu que ce soit la voix d’une femme, elle… L’anonyme passa devant elle et lui fit face.
« Vous savez, un marathon est organisé à Fantasia Hill chaque année… Il faudrait songer à vous y inscrire, vous courez vraiment vite ! »
Devant le visage défait de Mily, le jeune homme cligna des yeux, et, puisqu’elle ne disait toujours rien et semblait l’observer sans le voir, il eut un sourire gêné et lui tendit quelque chose.
« Je voulais seulement vous rendre ceci, vous l’avez oubliée sur un des bancs de l’église. Je n’aurais pas voulu que vous tombiez malade, car les enfants de la chorale comptent sur votre soutien… Vous viendrez aux répétitions, demain, n’est-ce pas ? »
Le temps de réaction d’Essylt et la façon dont elle avait pâli dans la grisaille environnante aurait pu lui valoir une palme de la meilleure imitation de phasme, mais elle la fit seulement se sentir stupide et déphasée. Quand elle retrouva la capacité de se mouvoir, elle tendit la main et prit l’écharpe que le jeune homme lui avait rapportée.
« Madame », souffla-t-elle.
« Je vous demande pardon ? »
Elle leva les yeux vers son interlocuteur.
« Je suis mariée. »
« Ah. »
Elle essayait de toutes ses forces de se sortir de sa léthargie. Ses bras et ses jambes lui semblaient faits de cotons. Le silence entre eux devint gênant pour le jeune homme, qui lui demanda poliment si elle avait besoin qu’il la raccompagne chez elle. Il parut soulagé qu’elle refuse. Elle enroula son écharpe autour de son cou, fit un nœud, et réussit enfin à lui adresser un léger sourire.
« Je vous prie de m’excuser, je suis seulement fatiguée. Je viendrai, demain, pour la chorale. Les répétitions commencent a dix heures, je me trompe ? »
« C’est bien cela. »
« Parfait, je ne serai pas en retard, puisque c’est juste après mon entrainement matinal. Pour le marathon. »
Le jeune homme rit doucement, Mily se félicita intérieurement d’avoir réussi à clore cet entretien sur quelque chose de socialement acceptable qui avait indiqué à son interlocuteur qu’elle n’était pas complètement folle, il lui souhaita bonsoir, elle le remercia de lui avoir rapporté son écharpe, puis elle repartit sereinement.

Elle passa sous le lampadaire d’un pas tranquille, se grondant intérieurement d’avoir été aussi peureuse. Elle tourna à gauche dans la rue de la Paix, prit la deuxième à droite, longea les quais sur une trentaine de mètres avant d’emprunter de nouveau une rue plus étroite (mais elle y était forcée si elle ne voulait pas passer devant cet horrible dancing night plein de débauchés, sur l’avenue principale).  Sa frayeur passée, elle regardait plus en elle-même que tout autour, le chemin appris par cœur lui laissant le loisir de penser à autre chose. Un sourire d’amusement mélancolique étira le rose de ses lèvres sans qu’elle n’y prenne garde. Elle songeait combien son époux se serait gentiment moqué d’elle si, en rentrant chez eux, elle avait pu le retrouver et lui raconter sa petite mésaventure. Il l’aurait consolée dans ses bras et traitée comme une petite fille seulement pour l’embêter, il aurait joué l’ironie mais elle y aurait lu de la tendresse. Elle rêva qu’elle l’aimait trop pour l’avoir assassiné, elle se persuada doucement qu’il serait assis dans un fauteuil et qu’il la serrerait fort dès qu’elle rentrerait à la maison. Hélas, elle s’éprit tant de rêver qu’elle ne vit plus la rue qu’elle empruntait. Elle n’aurait jamais cru que l’enfer la poursuivrait deux fois de suite, au cœur des ténèbres.


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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptySam 9 Nov - 16:13

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Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Il aurait voulu la retrouver. La sentir, sentir ses cheveux bousculés par les roulades maladroites du vent, par les mains de Drystan, timides sans l'être réellement, qui semblaient découvrir à nouveau son corps, il aurait voulu lui dire à quel point elle lui avait manqué, ou ne pas le dire, juste le penser, l'habituer à ces silences, à son silence, sans vraiment le faire, la rendre maîtresse, dominatrice bien trop innocente, ange dont les ailes se sont effacées, laissant place à l'absence, aux souvenirs, à trop de douleur pour pouvoir le supporter. Cela lui était devenu bien trop difficile, bien trop impossible, bien trop long. Il avait espéré, espéré voir enfin ses yeux, ce regard traverser une rue, croiser ses prunelles, non, les voir, les admirer, les observer, encore et encore jusqu'à ce qu'il ne sente plus que son dernier souffle, tant qu'elle était là, alors il était d'accord pour mourir, pour se laisser aller, ne plus ressentir aucune émotion. Mais même son fantôme n'était pas là, il n'y avait que le vide, le néant. Le néant qui répondait aux questions, silencieuses, de Voltaire, omniprésent. Il songeait souvent, perdu dans ses pensées, loin de ce monde-ci, comme s'il avait soudain disparu et s'était retrouvé ailleurs.

Il referma sa main sur son arme, à peine dissimulée sous son manteau, et serra les dents, se donnant un air plus sérieux qu'à l'accoutumée. Tuer n'était plus un problème. C'était devenu habituel, et son métier de tueur à gages lui avait appris, peu à peu, la vie à Fantasia Hill. Il était devenu l'ombre, se déplaçait toujours en silence, se mouvant dans la masse, invisible à travers les gens. Et là, encore, c'est à demi invisible qu'il observait la jeune fille de dos. Ses pas venaient de l'amener dans la ruelle, à peine éclairé par un lampadaire dont la lumière commençait déjà à vaciller, annonçant la fin de sa vie, proche. Elle marchait, et Drystan pouvait aisément regarder son dos, ses cheveux adorables, remontés en chignon, un peu brouillon. Un instant, Voltaire crut voir en elle son Essylt, mais il se résigna et, dédaignant cette pensée, la cachant au fin fond de son esprit, il resserra son étreinte autour de son silencieux. Inexplicablement, il hésitait. Comme si cette victime, cette nouvelle victime allait tout changer dans sa vie.

La nuit se couchait à peine. C'était le moment où, et tous les auteurs s'accordent sur cela, on ne peut distinguer un chien, digne représentant du jour, d'un loup, maigre signe languissant de la nuit qui attend patiemment son heure. La lune éclairait plus la ruelle que le lampadaire, et Drystan se complaisait à penser que c'était également le meilleur moment pour tuer. On ne pouvait distinguer que deux ombres, comme si lui avait été le loup, et sa victime un pauvre chien qui n'avait mérité que ça. Et c'est telle une ombre qu'il s'approcha de la jeune femme, silencieux, avant de fondre sur elle et de poser sa main sur sa bouche, afin de la rendre elle-même silencieuse. « Ne bouge pas. » Il fit l'erreur de céder à la curiosité, et la retourna pour fixer ses prunelles. A cet instant, un haut-le-coeur le prit.

Il la reconnut au premier regard, et la surprise causa la chute de son arme, qui tomba sur le sol avec un bruit sourd, brisant le silence de la nuit. Il ouvrit la bouche, et ses mains descendirent, lentement, le long de son corps, à mesure qu'il comprenait qui lui faisait réellement face. Il ne savait pas exactement pourquoi il l'avait reconnue. Pourquoi elle était si semblable à Essylt, au point qu'elles auraient pu être jumelles si celle-ci n'était pas son épouse, mais elle l'était. Drystan la connaissait. Il connaissait son expression par coeur, cette façon qu'elle avait de sourire avec innocence, ce regard adorable qui l'avait fait tomber, tomber pour elle. « ... Essylt ? »
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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyLun 11 Nov - 21:24

« Mon verre s'est brisé comme un éclat de rire » ♔ Guillaume Apollinaire
Il était son hapax. Il révélait une fantaisie de sa pensée, un mouvement involontaire de son âme, une faute de frappe malencontreuse en marge de son cœur. Elle, l’immobile enfant au teint nivéal, elle et la langueur valétudinaire de ses yeux, elle avait toujours retrouvé son courage dans l’impressionnant fracas que faisait en elle chacun des silences de Drystan. Ils s’éclipsaient l’un l’autre sur le cercle chromatique de leurs intériorités et se renvoyaient leur lumière tour à tour. Aussi Essylt n’avait-elle jamais vu quoique ce soit de bleu en lui. Elle ne le connaissait dans aucune nuance froide, ni taciturne ni intransigeant ni calculateur, puisqu’elle ne l’avait jamais vu sans elle. Elle ignorait qu’un humus givré avait jadis pétrifié ses émotions, elle ignorait qu’il avait vécu, avant elle, sans remord ni regret. S’il avait quelque chose de nocturne, ce n’était que nuits estivales, avec sur les lèvres la condensation de leurs soupirs qui revenaient la hanter aujourd’hui encore, alors qu’elle était si seule et désemparée. Il l’avait toujours tourmentée, poursuivie de ses assiduités puis de sa tendresse et de sa passion. Il savait ce qu’il voulait et, elle, il lui semblait qu’elle n’avait jamais su avant de le rencontrer. Il y avait plus de dionysiaque que d’apollinien en lui, il était du côté des forces vitales et de l’harmonie tapageuse des féeries multicolores. On aurait pourtant juré le contraire, à le voir si beau et si méditatif, certains matins qu’il faisait froid dehors, lorsqu’il l’attirait à lui pour l’assoir sur ses genoux devant un grand feu de cheminée. Elle n’avait jamais vu de bleu en lui. Seulement de l’incandescence.

Une chaleur aiguë l’arrêta, naquit dans son ventre et remonta jusque dans sa gorge au moment où tous ces souvenirs l’accablaient de leur bonheur illusoire. Elle se stabilisa au milieu de la ruelle, les projection du feu dans l’âtre imaginaire s’éteignirent lentement sur ses pupilles dilatées, le blanc de la candeur et du soucis retrouva sa place sur ses joues embrasées. Elle aurait cru qu’avec le temps les souvenirs seraient moins vifs, moins douloureux et enivrants, mais sans cesse ils la heurtaient de plein fouet et l’empêchaient littéralement d’avancer. Elle aurait voulu suivre la voie que Dieu avait ouverte devant elle, profiter de cet exil pour soigner ses blessures et devenir une meilleure personne. Purger sa peine et s’abandonner au gouffre fade de l’oubli. Sans amour et sans haine. Quelque chose de vivant et d’électrique restait latent en elle, stagnait sous la surface et se refusait à la laisser devenir cet épouvantail désincarné qu’elle s’appliquait à être. Parfois elle était rappelée à l’ordre par ce fantôme d’elle dont jaillissaient colère et fièvre : « J’existe ». Elle lui répondait : « Mensonge ».

Elle reprit sa procession une fois calmée, seulement après s’être assurée d’avoir retrouvé son désespoir habituel, qu’elle put observer dans un miroir brossé derrière une vitrine. Elle était encore loin d’atteindre le bout de la petite rue quand elle sentit, en un éclair, une main se poser fermement sur sa bouche et l’injonction de s’immobiliser à son oreille.
« Ne bouge pas. »
Elle avait plutôt l’intention de mordre de toutes ses forces cette main qui la bâillonnait et de tâcher de s’enfuir. Elle n’eut pas le temps d’avoir peur (ou peut-être qu’au fond elle n’en sentit pas la nécessité). Son esprit fourmillait d’instincts. Ce n’était pas de l’effroi mais plutôt un désir de se battre qui cimenta tout à coup son cœur. Elle hésitait toujours entre une morsure ou l’idée d’enfoncer le talon de sa bottine dans le pied de l’inconnu quand celui-ci la retourna brusquement vers lui sans cesser de l’étreindre. Elle leva un regard brûlant de colère et de panique sur le visage enténébré de l’homme qui avait parlé. Il retira sa main de sur ses lèvres. Le cri qu’elle aurait pu songer à préparer si ce miracle arrivait s’évapora au moment de l’impact. Leurs regards s’entrechoquèrent dans un silence tuant. Peut-être que ses précédentes émotions avaient aiguisé ses sens, peut-être que ses nerfs allaient lâcher, mais, après l’avoir reconnu, elle ne voulait toujours pas y croire, et elle crut qu’elle allait le frapper malgré tout. Les mains de l’homme, avec des gestes fébriles mais possessifs, avaient redessiné sa silhouette rapidement, comme s’assurant qu’elle n’était pas une ombre du passé qui s’évanouirait aux premiers contacts.
« Essylt ? »
Elle ne pouvait pas parler mais ses yeux répondirent à sa place à cet appel incrédule et douloureux de son mari. Elle en était encore à guetter un rayon de lune pour mieux apercevoir le visage de Drystan. Elle redécouvrit les grands lacs ombragés de ses yeux, se rappela s’y être prélassée  bien souvent jadis, et, quand elle retira timidement un de ses gants pour laisser une caresse furtive sur son visage, quand elle sentit sous ses doigts le contact de sa peau, toute la tension qui l’animait par tristesse et nécessité jusqu’à présent, tout ce qui la durcissait faussement l’abandonna d’un coup. Elle aurait pu s’évanouir entre ses bras si une autre force n’avait pas pris le relai. Son regard sembla alors s’allumer d’un rapide sourire qui disait « bonsoir » comme si elle l’avait seulement quitté la veille, et ses petites mains s’agrippèrent au col du manteau du jeune homme. Elle l’attira à elle tout d’un coup sans un mot, se mit sur la pointe des pieds et l’embrassa comme elle ne l’avait sans doute jamais fait, comme elle n’aurait jamais osé, mais ce soir leurs ombres s’étaient fondues en une pour la première fois depuis le début de l’éternité solitaire. Le jour s’alluma à son zénith entre leurs lèvres qui s’étaient trop cherchées, le cauchemar était enfin terminé, enfin ! Quelques larmes de Mily ajoutèrent leur grain de sel à l’avidité de ce baiser qui brûlait de douceur.
« Drystan », chuchota-t-elle enfin en appuyant sa joue contre la sienne, le souffle court.
Elle voulut reculer seulement une seconde pour l’admirer de plus loin, pour fixer cette image de lui dans son esprit (et cette image chasserait toutes les autres, toutes ces illusions fantasmées qui lui avaient fait plus de mal que de bien au cours de ces derniers mois d’isolement). Son pied se posa sur un objet dont le bruit de la chute, quelques minutes plus tôt, lui revint tout à coup en mémoire. En essuyant ses larmes d’une main et en ayant retrouvé son sourire d’avant, elle baissa la tête sans y penser, sans s’attendre à ce qu’elle allait avoir sous les yeux. La lune jetait un éclat métallique sur l’objet foncé qui semblait un peu lourd. La jeune femme se pencha et ramassa l’arme prudemment, un voile de scepticisme tombant lentement sur son visage à mesure qu’elle approchait le silencieux de la lumière. Elle observa longuement le revolver, puis Drystan. Elle voulait ne pas y croire, aussi, se souvenant du fusil de chasse de son grand frère, elle regarda si l’arme contenait une balle ou non. Les petits éléments cylindriques bien rangés dans leurs carcans argentés étaient prêts à faire feu. Mily dirigea l’arme vers le sol mais la tint à deux mains et recula d’un pas, fixant sur Drystan un regard étrange, dont on n’aurait su dire s’il était inquisiteur, triste, ou apeuré.
« Qui croyais-tu que j’étais, pour que tu penses avoir besoin de ceci contre moi ? »
Elle parlait lentement et d’une voix frigorifiée. Elle resta assez près de lui pour qu’il puisse bien la voir, pour qu’il puisse sentir comme elle était petite et désarmée devant lui, sentir l’ironie de la situation, pour un homme puissant comme lui se trouve le besoin de se protéger d’une fillette égarée comme elle. Elle étouffa une question au fond de son esprit tandis qu’elle le contemplait silencieusement. Y avait-il du bleu en lui ?


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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyMar 26 Nov - 23:23

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Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Il lui sembla que Dieu avait entendu sa prière. Lui qui ne laissait aucune place au surnaturel, qui ne croyait en aucune divinité, qui considérait chaque religion comme un blasphème de la vie, il crut une seconde que Dieu existait, que de ses mains gantées, il avait fait jaillir un miracle, et avait fait apparaître la douce Essylt, juste devant lui. A demi illuminée par la lune, qui lui donnait un de ces airs blafards semblables au cristal, aux gouttes qui s’épanchent sur un verre, dont les cris s’échappent, s’envolent, glissent, incapables de rester immobiles plus d’un instant. Il ne pouvait détacher son regard du sien, de ce visage dont il se languissait tant, de ces yeux dans lesquels il se noyait à la moindre occasion. Ce monde n’avait rien enlevé à sa beauté ; elle était toujours délicate, sensible et frêle, semblant n’être qu’un flocon de neige, un doux flocon de neige parmi la grêle qui tombait drue, tout autour. Ils n’avaient nul besoin de mots, de paroles qui seraient venues bafouer ce silence. Ils étaient simplement là, tous deux, et se regardaient ainsi, amoureusement, bien plus qu’ils ne s’étaient jamais regardés, comme s’ils se découvraient de nouveau. Drystan, presque interdit, ferma les yeux, alors que leurs lèvres se joignaient, silencieuses, dans le plus passionné des baisers. Il ne dit rien, attendit simplement que les secondes passent, ne voulant presque pas se détacher de ses lèvres, voulant rester pour toujours près d’elle, avec elle. Un de ses doigts vint sécher les larmes de la jeune fille, et il l’embrassa de plus belle, montrant tout son amour dans ce baiser échangé dans la confidence de la Lune qui les observait, secrètement. Il n’entendit qu’à peine son chuchotement, comme un petit sifflement qu’elle aurait glissé, tendrement, à son oreille. « Drystan » Tout lui venait en écho, et lui se sentait comme dans un monde parallèle, bien loin de tout. Et pourtant, il revint durement à la réalité.

Ses yeux tombèrent sur l’arme, sans doute au même moment que ceux de Mily, et il se rappela d’un coup la raison de sa présence. Il serra les dents, réfléchit un instant, se remémorant qui était celui qui avait, ô diable lui demander de tuer sa propre épouse, mais son esprit était troublé par Essylt, qui avait reculé de quelques pas. Il voyait son regard perdu, déboussolé et effrayé, et tendit la main instinctivement vers elle, voulant la protéger. Mais comment peut-on protéger une personne à qui l’on tient… de soi-même, de cet être sombre qui fait partie de nous ? Est-ce au moins possible ? « Ce n’est pas ce que tu crois, si j’avais su que c’était toi… » Petite pause. Il baissa les yeux. « Tu sais bien que je n’aurais jamais tiré, tu sais bien que je ne l’aurais jamais fait. » Pourquoi lui semblait-il bon de se justifier ? Il sentit l’ombre qui faisait partie de lui, il sentit l’âme âcre, l’opale présence sortie des ténèbres. Elle ramassa l’arme, et lui, inerte, indépendant de sa propre volonté, ne put qu’observer son propre crime, qui n’avait pas été commis. Encore.

« Qui croyais-tu que j’étais, pour que tu penses avoir besoin de ceci contre moi ? » Sa main revint vers lui. Peut-être se sentait-il en trop, d’un coup. Voltaire s’approcha d’elle d’un pas, tendit le bras vers l’arme. « Pourrais-tu lâcher cette arme ? » Il avait une façon si détournée de dépasser sa question, de passer outre, et sa voix était tellement posée, tellement calme qu’on aurait presque dit qu’il avait l’air calme. Mais, visiblement, il ne l’était pas, bien au contraire. Toujours calmement, il prit le silencieux des mains de la douce, et le déposa sur le sol, avant de prendre Essylt dans ses bras, et de la serrer, comme jamais il ne l’avait serrée, comme si leur vie en dépendait, comme si c’était là le dernier des élans de tendresse qu’ils avaient l’un pour l’autre. « Si tu savais comme je m’en veux, je mériterais le pire des châtiments pour avoir ne serait-ce que posé sur toi mes mains de cette façon… pardonne-moi, je t’en prie. » Drystan déposa un baiser sur sa joue, couvrant Mily de son manteau, ayant soudain peur qu’elle ait froid, elle qui était si fragile, si frêle. « Je t’ai cherchée, durant si longtemps… J’ai même cru que tu n’étais pas dans ce monde. Je suis tellement content d’enfin pouvoir te serrer dans mes bras, te voir, t’admirer… si tu savais. » Il n’avait pas pour habitude d’être émotif, ou même de parler de ses émotions, mais elle l’avait changé. Pour toujours. Et même s’il déviait sa question, s’il voulait éviter le sujet, il sentait le bonheur le parcourir dans tout son corps.
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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyVen 20 Déc - 23:48

« Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? » ♔ Charles Baudelaire
Un seul baiser. C’est tout ce dont la jeune fille eut besoin pour se souvenir des embruns du temps jadis. De nouveau, elle était assise sous la tonnelle de Conomore de Carhays, dans ce petit jardin d’hiver que Drystan avait fait construire exprès pour elle. Comme le jeune homme avait beaucoup voyagé, il avait fait importer des plantes exotiques de toutes les couleurs qui s’entremêlaient mollement à l’abri du gel. Elle lisait un livre, les yeux mi-clos, la tête appuyée sur des coussins parmi les fleurs, et soudain son époux rentrait, avec sa cape et ses bottes de chasse, et se glissait doucement près d’elle pour l’embrasser sur le front, la tirant à peine du demi-sommeil dans lequel elle était plongée. Ou bien il étalait sa cape par terre et s’asseyait à ses pieds, ce grand et bel homme qui la toisait de plus d’une tête, il l'observait en contrebas avec un regard d’amoureux. Une odeur de cheval et de musc se mélangeait aux parfums capiteux des fleurs écloses, le bruissement délicat de la robe de Mily dessinait les silences au milieu de la mélodie grave jouée par la voix de Drystan, qui lui racontait d’anciennes aventures de ses explorations lointaines. Elle portait cette robe de soie blanche dont le décolleté était modestement couvert par une couche de dentelle, quelque fois il la grondait de porter cette tenue en hiver et s’empressait de la mener devant l’âtre de la cheminée, pour ne pas qu’elle ait froid. Elle n’avait jamais éprouvé la moindre sensation de froid tant qu’il était auprès d’elle. Il faisait barrage à l’hiver de ses larges épaules et la protégeait de la rudesse du climat. De temps en temps, elle s’abîmait les yeux sur un ouvrage de couture très précis, et tout à coup il venait derrière elle et lui prenait les mains pour l’empêcher de s’épuiser. Il avait toujours été là pour prendre soin d’elle. Elle avait toujours été là pour faire ressortir ce qu’il y avait de plus doux en lui. Qu’étaient-ils devenus désormais, pauvres hères séparés l’un de l’autre pendant de trop longs mois ? Essylt était si blanche, si malade, le sommeil lui manquait tellement. Et Drystan… Il passa ses doigts sur la douceur abricot de la joue de Mily, pour essuyer ses larmes, par habitude, mais elle sentait qu’il avait souffert, que quelque chose l’avait secoué au plus profond de lui-même et fait surgir quelque chose de bestial qui sommeillait dans les tréfonds de son âme. Elle l’entraperçut au travers d’un symbole jeté à terre, un revolver qui cliqueta à ses pieds lorsqu’elle recula de quelques centimètres.
« Ce n’est pas ce que tu crois, si j’avais su que c’était toi… Tu sais bien que je n’aurais jamais tiré, tu sais bien que je ne l’aurais jamais fait. »
Le savait-elle ? Elle voulait du moins y croire. Mais si cela n’avait pas été elle…? Elle ramassa l’arme pour voir si elle était chargée. Il ne manquait aucune balle. Drystan parut soucieux. Plus précisément, il paraissait fort calme, mais elle le connaissait suffisamment pour déceler une légère tension qui l’animait tout à coup. Il se rapprocha alors qu’elle levait vers lui son visage inoffensif et clairvoyant, ce regard limpide qui le transperçait avec soucis et bienveillance. Il tendit la main vers elle. Elle se souvint en un éclair qu’il avait eu ce geste, quelques minutes avant qu’elle le croit mort. Il l’avait saisie à la gorge et l’avait auscultée du regard, cherchant le mensonge sur ses traits dociles. Elle n’avait jamais eu peur de lui. Est-ce qu’elle était certaine qu’il ne lui ferait jamais de mal ? Non, elle ne pouvait en être absolument  sûre. Est-ce qu’elle croyait qu’il ferait tout ce qui sera en son pouvoir pour ne jamais la blesser ? Oui, elle n’en doutait pas un seul instant, car il l’aimait sur le tranchant de la lame qui sépare la raison de la folie, le bien du mal, la lumière de l’obscurité.
« Pourrais-tu lâcher cette arme ? »
Elle ne savait pas s’il parlait davantage du revolver en question ou de ses deux prunelles bleues qu’elle dardait sur lui de façon inflexible. Il se saisit de la crosse du revolver qu’il reposa délicatement au sol, avant de s’emparer d’elle et de la blottir contre lui. Il semblait agité intérieurement d’une peur irraisonnée de la perdre de nouveau, aussi se cramponnait-il à elle. Elle resta détendue entre ses bras et huma son odeur avant de prêter oreille à ses paroles.
« Si tu savais comme je m’en veux, je mériterais le pire des châtiments pour avoir ne serait-ce que posé sur toi mes mains de cette façon… pardonne-moi, je t’en prie. »
Là encore, la phrase pouvait prêter à interprétation. Parlait-il de la façon dont il l’avait empoignée à l’instant, avant de la reconnaître, ou faisait-il allusion à leur dernier contact avant l’exil, avant le nouveau monde ? Sans doute songeait-il un peu aux deux.
« Tu ne m’as pas fait peur, mon amour, murmura-t-elle d’un ton caressant pour le rassurer. J’ai bien failli te mordre, en revanche. J’avais jadis un époux qui m’a enseigné comment ne point me laisser faire, vous savez ? »
Elle releva la tête vers lui et lui adressa un petit sourire. Il se pencha pour l’embrasser sur la joue, avant d’ouvrir son manteau et de l’inciter à se lover contre lui. Il referma ses bras et le tissus chaud autour d’elle, avec cette même crainte qu’elle ait froid que du temps où ils habitaient en son château et qu’il la portait auprès du feu.
« Je t’ai cherchée, durant si longtemps… J’ai même cru que tu n’étais pas dans ce monde. Je suis tellement content d’enfin pouvoir te serrer dans mes bras, te voir, t’admirer… si tu savais. »
Elle savait. Elle avait elle aussi éprouvé l’isolement, avec la conviction d’avoir perdu l’amour de sa vie. Elle s’était tenue au bord de la folie et du désespoir car l’horizon s’était transformé en gouffre. Elle ignorait comment elle avait pensé à lever la tête pour contempler le ciel. Là où Drystan voyait superstitions et fables enfantines, Mily projetait sa foi, car elle savait que la lumière des étoiles reflétait celle de quelque chose de plus grand. Les espaces infinis s’ouvraient à eux et un milliard d’astres traçaient dans le ciel l’histoire des temps. Quelque part, une constellation devait dire qu’ils se retrouveraient, que ce soit au milieu de cette venelle humide et dépeuplée ou ailleurs, aux portes de l’au-delà. Elle n’avait pas peur, elle avait seulement souffert beaucoup de la solitude.
« J’ai cru que je t’avais tué dans un autre monde, et que celui-ci n’aurait pas la clémence de te ramener à moi. J’ai envie de pleurer de fatigue mais je suis trop heureuse pour verser des larmes, trop heureuse que tu m’aies retrouvée… »
Elle l’embrassa à sa hauteur, c’est-à-dire dans son cou, avant de le regarder de nouveau, reculant à peine. Elle scruta son regard avec un air à la fois profondément heureux et infiniment triste.
« Mon cœur… Dis-moi seulement à quel prix tu as payé ton arrivée dans ce monde… Qu’as-tu laissé de ton âme dans notre pays d’origine pour qu’il y ait cette blessure si profonde au fond de tes yeux ? De qui as-tu si peur qu’il te faille une arme pour arpenter les rues ?... »


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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptySam 21 Déc - 1:02

Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Tumblr_inline_mtra4p7uV71rihtxy Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt 153y7ub
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Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Les souvenirs le submergeaient. Il ne savait plus où regarder, tant elle lui semblait merveilleuse. Elle n'était pas parée d'atours, elle ne portait pas mille bijoux qui étincelaient, bordant son cou de parures, de mille délices. Et pourtant. Et pourtant, à cet instant, il sentait son cœur battre plus vite qu'il n'avait jamais battu. Il sentait les oiseaux, avides, prêts à se jeter dans une foule subtile, à demi invisible. Il était partagé. Partagé entre la honte, l'amour, la haine, l'incompréhension. Le destin était trop clément, si clément que cela en devenait presque anormal. Ils n'avaient pas cette manière simple de s'aimer, il fallait toujours que quelque chose se mette en travers du chemin. La plus importante marche à faire disparaître, était sans doute la sœur d'Essylt. Drystan ne la supportait pas. S'il avait pu, il l'aurait faite brûler sur un bûcher volontiers, afin de s'en débarrasser. Il l'aurait supprimée sans pitié si sa douce Mily ne tenait pas autant à sa sœur. Foutu amour filial. Foutues habitudes de ne pas arriver à aimer. Il ne connaissait cela que trop bien. « Tu ne m’as pas fait peur, mon amour, j'ai bien failli te mordre, en revanche. J’avais jadis un époux qui m’a enseigné comment ne point me laisser faire, vous savez ? » Il rit, presque avec franchise. Il la reconnaissait bien là dans ces propos. Il reconnaissait cette façon qu'elle avait d'être si simple et si audacieuse, si singulière et si merveilleuse à la fois. « Il a bien fait de t'apprendre cela, il ne faudrait pas que quelqu'un fasse du mal à son amour, je suis certain qu'il en serait dévasté. » Il fit une pause, se rappela un mot. « Pourquoi cette utilisation du « jadis », mon amour ? Aurais-je du souci à me faire ? »

« J’ai cru que je t’avais tué dans un autre monde, et que celui-ci n’aurait pas la clémence de te ramener à moi. J’ai envie de pleurer de fatigue mais je suis trop heureuse pour verser des larmes, trop heureuse que tu m’aies retrouvée… » Il prit son menton délicatement entre ses doigts, observa ses prunelles pâles, s'y perdit plusieurs fois, avant de réussir à retrouver un rivage dont il n'était même pas sûr de l'existence, rampant sur le sable tel un serpent. Elle était sa pomme, son serpent, et lui était aussi faible qu'Adam et Eve réunis. « Je ne t'aurais jamais abandonnée, ni dans ce monde ni dans le nôtre, tu le sais. La seule qui peut être à l'origine de tout cela... » Il se tut, incapable de poursuivre, de peur qu'elle ne soit encore pas d'accord avec lui. Après tout, sur ce sujet, ils ne tombaient jamais d'accord. L'un disait que tout était faux, l'autre assurait le contraire avec tant de véhémence, de persévérance.

Lovée ainsi contre lui, tel un chat près de son maître, même si elle avait plus de liberté qu'un vulgaire matou sans réelle conviction, il ne répondit rien à son baiser, déposé dans son cou comme une perle que l'on poserait dans une huître, doucement, méticuleusement, avec la volonté de ne surtout pas la casser, la briser ou même la blesser. « Mon cœur… Dis-moi seulement à quel prix tu as payé ton arrivée dans ce monde… Qu’as-tu laissé de ton âme dans notre pays d’origine pour qu’il y ait cette blessure si profonde au fond de tes yeux ? De qui as-tu si peur qu’il te faille une arme pour arpenter les rues ?... »[/color] Il baissa les yeux. Il savait qu'il avait fait une erreur. Mais il n'avait pas eu le choix, à dire vrai, il n'avait pas eu le choix car c'était la seule solution qu'il avait trouvée pour trouver Essylt. Pour la retrouver, plutôt. « J'avais laissé mon cœur, dans une boîte. Mais la boîte vient de m'être apportée, alors ne nous faisons plus de souci. Je n'ai peur de personne, tu le sais bien. C'est simplement que... je me trouve une occupation dans ce nouveau monde. Et c'est cette même occupation qui m'a permis de te retrouver. »[/color]
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MessageSujet: Re: Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige. - Essylt EmptyMer 25 Déc - 16:14

« Une seule rampe de papillons. (Le Feu) » ♔ Francis Ponge
Quand Drystan lui posa une double interrogation de sa voix profonde et calme, Mily baissa la tête une seconde. Elle se souvint qu’elle avait dans la poche de son manteau les morceaux déchirés des papiers du divorce, que Peter avait refusé de signer. Désormais, lorsqu’elle recevait du courrier, elle ne s’appelait plus « Essylt Carhays » mais bien « Essylt Shadow ». On lui avait expliqué, à la mairie, qu’il s’agissait d’une simple erreur d’administration, quelques papiers glissés dans le mauvais dossier ou elle ignorait quoi, mais les faits étaient là : aux yeux de la loi, elle appartenait à un autre homme que Drystan. Elle ne suivait d’ordinaire que son cœur, et pourrait bien déclarer que la loi lui importait moyennement, cependant elle n’était pas certaine que Drystan soit enchanté d’apprendre cette faute légale et, pire encore, elle se figurait bien qu’il serait mécontent que Peter ait (pour une raison inconnue et sans doute peu raisonnable) décidé de ne pas divorcer d’avec elle. Il lui avait même ironiquement allégué que, « par égard pour elle qui, était si pieuse », il ne se sentait pas l’autorisation de divorcer alors que cela allait à l’encontre de sa foi. Il est vrai qu’on avait toujours dit à Mily qu’il était mal de rompre les liens sacrés du mariage, que cela jetait l’opprobre sur toute la descendance et envoyait l’âme directement en Enfer. Cependant, les yeux clairvoyants de Mily lui faisaient deviner que la faute était commise non pas lorsqu’un mariage était rompu mais lorsqu’une promesse faire devant Dieu l’était. Or, ce mariage, cette erreur administrative, n’avait jamais été approuvé par quelque représentants du Seigneur. Ainsi, le divorce lui semblait raisonnable et, lui aussi, purement administratif. Peter n’avait rien voulu entendre, il s’était contenté de s’entêter jusqu’à… La jeune femme ferma les yeux un instant, craignant que Drystan y lise le déroulement des évènements de cette journée pour le moins étrange. Peter l’avait embrassée tellement délicatement alors qu’il était si furieux et vexé, il l’avait embrassée au coin des lèvres et elle… l’avait giflé. Comment avait-elle osé ? C’est qu’elle avait eu très peur. Néanmoins elle regrettait absolument tout dans ce geste : elle regrettait d’avoir si violemment refusé un baiser qui certainement n’avait rien d’offensant, et elle regrettait d’avoir levé la main sur quelqu’un dans la maison du Seigneur. Pourtant elle ne trouvait pas que Peter avait le droit de la toucher ainsi. A présent, que devait-elle dire à Drystan ? Elle commençait à redouter que le silence qui venait de s’installer ne s’éternise un peu trop au goût de son époux. Elle secoua doucement la tête et lui adressa un sourire léger comme la caresse du vent.
« Non, il n’y a nulle inquiétude à avoir, parce que je t’aime et que nous nous sommes enfin retrouvés… »
Elle espéra que sa voix resterait douce et paisible pour la suite de son discours.
« Cependant j’ai dû faire face à une situation un peu surprenante. Il m’a fallu me rendre à la mairie il y a quelques semaines. On m’a alors appris que j’ai été mariée par inadvertance à un monsieur que je ne connaissais pas. Il se trouve que je suis encore légalement son épouse mais bien entendu cela n’a aucune valeur à mes yeux… »
Si elle avait pu faire l’enfant et enfouir sa tête sous le manteau de Drystan, se cacher les yeux contre son torse, pour ne pas avoir à soutenir son regard myosotis… elle resta bien droite car elle n’avait plus huit ans. Sans doute n’avait-elle jamais eu huit ans, à bien y réfléchir.

Elle guetta sa réponse mais son attention fut bientôt portée sur le revolver qu’avait fait tomber son époux. Elle n’avait pas encore relevé sa référence moyennement discrète à Nolwann. Ses yeux s’étaient seulement chargés de tristesse. Elle n’avait pas retrouvé sa sœur, et la jolie blonde lui manquait cruellement. Si elles avaient pu arriver ensemble dans ce monde nouveau, Essylt aurait puisé sa force en elle, ou plus précisément pour elle. Elle se battait toujours mieux pour les autres que pour son propre compte. A voir la triste épave d’elle-même qu’elle était devenue en si peu de temps, Essylt osait à peine imaginer l’état de Nolwann, qui était si douce, qui risquait tellement de suivre n’importe qui dans la rue et de se laisser abuser… Nolwann était trop fragile et trop tête en l’air pour survivre seule ici.
« Si tu savais comme ma sœur me manque, mon amour, murmura-t-elle lentement, tu ne sous-entendrais pas d’aussi vilaines choses à son sujet. Comment veux-tu qu’elle puisse recourir à un tel sortilège ? Tu sais bien que ses préoccupations se situent fort loin de la littérature et des objets poussiéreux en général. L’imagines-tu vraiment prononcer des incantations devant un vieux grimoire ? Mon cœur, ne dirige pas ta haine contre n’importe qui sous prétexte que notre situation est inexplicable, et considère plutôt que nous avons une seconde chance de faire de notre vie un enchantement perpétuel. »
Elle avait posé sa main sur le haut du bras de son époux et appuyait doucement, tendrement, mais pour qu’il comprenne que ce qu’elle disait était important pour elle. Elle conservait cette manière d’antan de s’adresser à lui, respectueuse et pleine d’affection, quand elle souhaitait l’inciter à entendre raison, puisqu’elle n’ignorait pas qu’il prendrait les décisions finales mais qu’elle pouvait néanmoins l’influencer et le conduire sur la bonne voie à force de douceur et de patience. Ainsi cherchait-elle constamment à tempérer ses réactions les plus ardentes, à apaiser les pensées qui marquaient son âme au fer rouge de leur incandescence. Le sujet du revolver fit alors un retour dans la conversation. L’explication nébuleuse que Drystan lui donna, loin de rassurer la jeune femme, la maintint dans un état d’anxiété qu’elle dissimulait difficilement.
« J'avais laissé mon cœur, dans une boîte. Mais la boîte vient de m'être apportée, alors ne nous faisons plus de souci. Je n'ai peur de personne, tu le sais bien. C'est simplement que... je me trouve une occupation dans ce nouveau monde. Et c'est cette même occupation qui m'a permis de te retrouver. »
Qu’il n’ait peur de personne ne la tranquillisait pas davantage. Savoir que son époux était plus fort que la majorité était légèrement rassurant, mais que pourrait-il bien faire contre quelqu’un qui possèderait une arme semblable à la sienne, par exemple ? Mily ne voulait pas qu’il ait affaire à des individus dangereux, et c’est pourtant ce que le revolver laissait supposer. Elle décida de sourire, d’essayer la manière douce de faire passer son message.
« Est-ce moi, ta boîte ? Une jolie boîte, j’espère ? »
Elle se redressa pour l’embrasser au coin des lèvres. Il lui semblait tout à coup soucieux, cela ne laissait rien présager de bon. Alors elle posa un deuxième baiser au même endroit, et un troisième avant de rire légèrement.
« Fais-moi un sourire, monsieur l’homme occupé ! C’est à toi de ne plus te faire de soucis. Je te protègerai bien mieux que n’importe quelle arme, tu sais ? »
Elle rit de nouveau, de ce petit rire qui faisait un bruit de perles de nacre rebondissant sur un escalier de marbre. Elle plaisantait, mais à moitié seulement. Que le Diable en personne vienne la voir pour lui arracher son Drystan, il comprendrait ce que sont les Furies, il saurait qu’on ne torture pas davantage une créature qu’on a déjà jetée à terre et qui vient à peine de se relever.



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