Leurs lèvres s'étirèrent sur deux rangées de crocs acérés, dévoilant un sourire ô combien gourmand. Les deux chacals tournaient autour d'un cœur tendre dont la pureté les faisait saliver. Ils avaient faim. Horriblement. Leurs oreilles étaient dressées comme deux tours. Fébriles, le cœur palpitant, ils se toisaient comme deux prédateurs, n'évoquant l'idée de s'entretuer que dans les infimes poussières qui flottaient dans leur spirale infernale. La nuit terminait d'étendre son décor sombre et énigmatique, étalant son manteau crépusculaire sur le tapis du ciel. Un voile opaque s'était échappé comme une danseuse gitane de leur bouche saillante. Au centre du cercle qu'ils s'étaient entrepris à créer, et dans lequel ils se tournaient autour comme deux vils rapaces, la brebis agonisait, tremblante et immaculée d'une pellicule de sang. Elle implorait ce quelque chose qu'ils ignoraient...la pitié. Elle les distrayait. Bête de foire, elle n'était que le bouffon de deux Seigneurs avides de cruauté et de bacchanale. Dans un dernier soupir, elle s'éteignit sous l'avidité de ses bourreaux.


Entre la Moire et le Dieu des Enfers, c'est une longue histoire. Attention à ne pas vous brûler les doigts!

Clotho est sans nulle doute l'unique créature en ce bas monde capable de froisser le sombre personnage qu'est Hadès. Elle seule arrive à susciter chez lui un soupçon d'angoisse, voire la peur. Ces deux hyènes sont deux coupes de vin remplies de raisin moisi. Derrière eux, la trace de quelques morts. Réciproquement, la belle Moire connaît ses limites. Entre eux virevolte une flamme qui n'a rien d'anodin. Sa chaleur n'est pas de celles qui réchauffent les pauvres malheureux du froid mordant, elle les consume jusqu'à n'en laisser que des cendres. Deux figures imposantes qui se cherchent, se repoussent pour mieux se retrouver. Il y a beaucoup de respect entre eux. Ensemble, ils font partis d'une bulle sombrement divine, éjectant les gueux dans les bas-fonds.

Elle flâne telle une louve affamée. Elle le guette, le menace de ses iris enflammés. Sous ses sourires baignés d'hypocrisie, elle s'amuse. Elle n'est pas pressée...Elle prend son temps. Difficile de percer ses plus intimes pensées. Hadès se sentait dépouillé de ses pouvoirs en sa présence. Il se sentait insignifiant.

Elle est sa rose, et le pique de ses épines tranchantes. Elle aspire son venin et s'en délecte comme d'une liqueur. La Bête s'est nourrie...

Hissés à l'apogée d'une hiérarchie de renom, Hadès et Clotho sont de ces "Grands", ces "Requins" qu'il ne vaut mieux pas irriter.