A toi le pire être que la terre est connue

 Tu n’es plus là.  Je n’ai plus à avoir de toi, je peux enfin respirer, je peux enfin vivre ou en tout cas essayer. Même si la douleur ne disparaitra jamais, il me semble que la blessure cicatrice doucement quand je n’ai plus à supporter ton existence. J’ai tant voulu, tenter de me venger, de te retrouver que je ne me suis pas rendu compte que je devais passer à autre chose pour faire mon deuil. Depuis ce soir-là, son fantôme me suit partout, je la sens prêt de moi, j’entends encore son hurlement strident retentir dans toute la forêt. A cette époque, tu ne le sais pas, mais j’étais un simple paysan qui cultivait la terre et qui te laissait même en paix quand tu osais prendre une ou deux poules. Mais cette fois-ci, tu en as voulu plus, ça ne te suffisait pas de prendre ce que je mangeais, tu as pris ce que j’avais de plus cher, ma fille, ma Nina. Elle n’avait que huit ans, elle n’avait jamais connue sa mère qui est morte quand elle avait seulement un an d’une grippe. Je n’avais plus qu’elle et c’était bien assez. Si seulement tu lui avais laissé une chance, tu te serais rendu compte à quel point elle était la personne la plus adorable de ce monde, elle aurait essayé de t’apprivoiser j’en suis certain, c’est d’ailleurs ce qu’elle a du faire, j’imagine la scène, j’en rêve la nuit. Son sourire, sa main en train d’approcher ton visage et toi, sans aucune pitié, lui ôtant la vie. Après ça, mon existence n’a été que vengeance, je t’ai traqué dans cet immense bois que je découvrais petit à petit. Au fil des années, je suis devenu un des meilleurs chasseurs, je connaissais cette forêt comme ma poche, c’est son souvenir qui m’a fait tenir le coup, le souvenir de son cri terrifiant mais aussi celui de ton regard cruel et sans âme. Je n’ai jamais perdu courage, jamais. Puis il y a eu cette fillette, son regard, son rire, ses cheveux, tout me rappeler mon enfant, elle avait aussi son tempérament, trop téméraire, trop optimiste et naïve. Elle aussi, tu l’as voulu, tu l’as désiré mais c’est ce qui t’a perdu. En croisant son chemin, plusieurs fois sur les sentiers, je me suis douté que tu l’as trouverais un jour, seule comme Nina et que tu attaquerais.  Ce jour-là, il faisait tellement beau, le soleil brulait mon visage et quand elle est passée, ma saluant comme d’habitude, ma méfiance a pris le dessus, je l’ai suivi. Il fallait que je sache qu’elle soit bien en sécurité. Quand elle est entrée, j’allais faire demi-tour, mais par la fenêtre j’ai vu ton regard quand tu as sauté sur elle. Quelle erreur tu as fait, tu attendais deux minutes de plus et je ne te voyais pas, je passais mon chemin comme s’il n’y avait aucuns problèmes. J’ai sauvé cette petite fille ce jour-là, je l’ai ramené à sa mère et je l’ai détesté elle aussi. Pourquoi elle n’avait pas été tuée par tes soins plutôt que ma fille à moi ? Pourquoi cette mère si inconsciente de laisser sa fille partir comme ça sans surveillance avait le droit de retrouver son enfant portant un petit chaperon rouge comme celui qu’avait Nina ?

J’ai tellement pensé à toi, tellement ressassé ses questions dans ma tête que maintenant que je suis arrivé à Fantasia Hill la vie me semble moins amère. Son fantôme ne me suit plus comme avant, le souvenir de son cri n’est plus présent toutes les nuits. Heureusement quand il me reprend de penser à elle et toi, j’ai ma meilleure amie qui m’attend, ma bouteille d’alcool. Elle peut avoir différent noms : Vodka, Whisky,  bière, Tequila, Rhum … ce qui compte n’est pas son nom mais l’effet qu’elle a sur moi, elle m’apaise, m’endort. Même si ici, ce n’est pas chez moi, je croise des gens qui ne me connaisse pas, qui ne me regarde pas avec pitié, ils ne savent rien de ma tragédie. Tu vas me dire ma vie n’est tout de même pas très réjouissante, je suis sans boulot fixe, je ne m’intègre toujours pas à ma communauté. Je suis seul mais la solitude est plus facile. On ne pourra plus m’enlever quelqu’un que j’aime si je ne suis pas aimé. Mais tout ce que j'ai à te dire, c'est que même si je te recroise dans un corps d'humain, je te le promet, je ne te laisserais pas une chance. Tu n'as pas le droit à une autre chance. Et si une personne ose t'aimer, je serais là pour te l'enlever.

Alors soit prêt saleté de loup. J'espère que tu pourris aux enfers.